Les associations d’insertion en Lorraine : leviers d’action pour l’émancipation et la cohésion

13 août 2025

Associations d’insertion : un maillage dense au service du territoire

La Lorraine compte aujourd’hui plus de 38 000 associations (source : INSEE, 2023), dont plusieurs centaines œuvrent spécifiquement pour l’insertion socio-professionnelle – un mouvement particulièrement visible dans les grandes agglomérations (Nancy, Metz, Thionville) mais aussi dans les bassins ruraux touchés par le chômage ou la désindustrialisation.

  • Structures d’Insertion par l’Activité Économique (SIAE) : associations intermédiaires, ateliers et chantiers d’insertion, entreprises d’insertion… en Lorraine, ce secteur mobilise près de 200 structures, employant chaque année plus de 7 200 personnes éloignées de l’emploi (source : DREETS Grand Est, Observatoire SIAE 2022).
  • Associations spécialisées dans l’accompagnement social : elles proposent accueil, écoute, orientation, hébergement, aide administrative, accès aux droits et aux soins, etc. Parmi elles, l’Apei Moselle, l’Adie Lorraine ou la Fondation Abbé Pierre, très investies localement.
  • Réseaux de lutte contre l’exclusion : le Secours Catholique, la Croix-Rouge Française, la Ligue de l’enseignement ou des collectifs comme Les Restos du Cœur, disposant d’antennes très actives dans la région.

La diversité et la complémentarité de ces structures constituent une force précieuse sur le terrain, révélant la capacité du tissu associatif lorrain à innover, s’adapter et mutualiser ses ressources.

Un enjeu majeur : l’insertion par l’emploi et la remobilisation

En Lorraine, le taux de chômage reste supérieur à la moyenne nationale (8,3% contre 7,1% en 2023 – source : INSEE), notamment dans les anciens territoires industriels. C’est dans ce contexte que les associations jouent un rôle moteur, en proposant des parcours adaptés à ceux qui rencontrent le plus de difficultés : jeunes sans diplôme, bénéficiaires du RSA, demandeurs d’asile, femmes éloignées du marché du travail, seniors en rupture de parcours.

  • Accompagner vers l’emploi durable : l’objectif des SIAE n’est pas seulement de proposer des contrats, mais aussi de construire des parcours individualisés mêlant missions de travail, formation, ateliers de remobilisation et suivi social. 37% des salariés sortis des SIAE en Lorraine en 2022 ont retrouvé un emploi ou une formation qualifiante dans les 6 mois (source : DREETS Grand Est).
  • Répondre à de nouveaux besoins : le secteur adapte ses réponses face à des publics aux problématiques multiples, par exemple via des dispositifs « Premières Heures en Chantier » pour personnes très éloignées de l’emploi ou des groupes de remobilisation pour jeunes NEET (« ni en emploi, ni en étude, ni en formation »).

Au-delà de l’insertion professionnelle, la dimension sociale reste omniprésente : renforcer la confiance en soi, rompre l’isolement, prévenir les risques de perte de logement ou d’accès aux droits. De nombreux dispositifs sont coconstruits avec les pouvoirs publics, la CAF, Pôle Emploi ou des fondations, mais l’ancrage territorial et la proximité restent l’ADN des associations.

Initiatives locales innovantes et impacts concrets

Les associations lorraines d’insertion développent des projets novateurs, s’appuyant sur le tissu économique local, le dialogue avec les entreprises, mais aussi l’expérimentation sociale.

  • Les chantiers d’insertion à impact environnemental : en Meuse et Meurthe-et-Moselle, des associations comme la Maison de la Nature ou Novaedia mêlent insertion professionnelle et transition écologique : agriculture bio, recyclerie, gestion de ressourceries, animation d’espaces naturels protégés, etc.
  • La montée en puissance du numérique solidaire: La Fabrique Numérique de Nancy accompagne les demandeurs d’emploi dans l’acquisition de compétences digitales, grâce à des ateliers financés en partie par l’Etat et la Région (source: France Num).
  • Insertion et mobilité : en Moselle, l’association PIJ Maizières met à disposition des scooters électriques pour favoriser l’accès à l’emploi en zone rurale, un levier efficace pour lutter contre la « double peine » isolement/chômage (France 3 Grand Est, 2023).

D’autres initiatives émergent : jardins partagés avec des chômeurs longue durée, ressourceries, inclusion par le sport (initiatives de la Ligue du Sport Adapté), dispositifs d’entrepreneuriat social pour publics fragiles (Incubateur TCRM-Blida à Metz)…

Chiffres clés : poids et dynamique de l’insertion associative en Lorraine

Indicateur Valeur en Lorraine (2022-2023) Source
Nombre de SIAE 200 DREETS Grand Est
Bénéficiaires annuels (emplois d’insertion) 7 200 DREETS Grand Est
Taux de retour à l’emploi/formation après une SIAE 37% DREETS Grand Est
Part de jeunes (-26 ans) accompagnés 26% UNAI Lorraine 2022
Nombre de bénévoles dans les structures d’insertion 2 500 estimés UNAT Lorraine, 2023
Part de SIAE rurales 35% Observatoire SIAE

Le modèle économique de ces associations reste fragile, car il repose en grande partie sur la subvention publique (Etat, Région, Fonds social européen…), complétée par l’activité économique générée et les dons. Mais l’innovation, la diversité de l’offre et le soutien des collectivités leur permettent de résister face à la conjoncture.

Partenariats et coopérations : l’atout collectif

L’efficacité des associations d’insertion en Lorraine repose en grande partie sur la capacité à travailler en réseau :

  • Dispositifs territoriaux, comme les Plans Locaux pour l’Insertion et l’Emploi (PLIE) : permettent d’articuler actions associatives et politiques publiques, de mutualiser formations, suivi, offres d’emploi.
  • Partenariats entreprises-associations : par exemple, la Coopérative d’Activité et d’Emploi Artenréel Lorraine permet à des personnes en parcours d’insertion de porter un projet entrepreneurial « testé en grandeur réelle ».
  • Liens avec le secteur sanitaire, social et éducatif : nombreuses coopérations avec les missions locales, CCAS, éducateurs, centres sociaux, qui favorisent une prise en charge globale.

Des collectifs comme l’URIAE Grand Est, le Mouvement Associatif Grand Est ou la Fédération des Acteurs de la Solidarité Grand Est fédèrent les acteurs, mènent un travail de plaidoyer et de veille, et accompagnent la professionnalisation du secteur (ateliers, formations, rencontres annuelles…).

Défis et perspectives pour l’avenir du secteur d’insertion

Le contexte général reste complexe : les besoins sociaux augmentent, alors que les financements publics, en particulier ceux issus de l’Etat et de l’Europe, font face à des incertitudes. En parallèle, la réforme de l’assurance chômage, l’évolution des dispositifs d’aide (par exemple la nouvelle Garantie Jeunes Universelle), ou la montée des enjeux environnementaux impactent l’activité des associations.

  • Remise en question des modèles traditionnels : il devient indispensable d’innover, de diversifier les sources de financement, de croiser l’insertion avec d’autres enjeux (écologie, santé mentale, numérique).
  • Recrutement et fidélisation des bénévoles/encadrants : de plus en plus difficile, alors que les publics à accompagner sont « plus complexes ».
  • Numérisation : la fracture numérique accroît le risque d’exclusion, mais offre de nouvelles opportunités d’accompagnement.
  • Évaluation de l’impact : démontrer l’utilité sociale devient crucial pour consolider les financements et renforcer la confiance des partenaires (publics, entreprises, usagers).

Beaucoup d’associations misent sur la coproduction avec d’autres acteurs, l’expérimentation de nouveaux outils, la création d’antennes mobiles ou la participation à des appels à projets nationaux et européens. Le secteur commence aussi à attirer de nouveaux profils : jeunes diplômés, personnes en reconversion, entrepreneurs sociaux...

Une dynamique à préserver et à renforcer

À travers ces chiffres, ces initiatives et ces témoignages, c’est tout le dynamisme et la résilience du monde associatif lorrain qui transparaît. Les associations d’insertion sociale et professionnelle constituent un maillon indispensable de la cohésion sociale et économique d’un territoire traversé par des mutations profondes. Leur force ? La proximité, la capacité à inventer des solutions sur mesure, leur éthique d’entraide et d’émancipation.

Du développement du numérique aux enjeux de transition écologique, en passant par l’inclusion des jeunes et la coopération avec les entreprises, la Lorraine peut s’appuyer sur ce maillage pour poursuivre l’inclusion et la solidarité, au plus près des besoins des habitants. Valoriser, consolider et renouveler cet engagement collectif reste plus que jamais un enjeu d’avenir pour le territoire.

Ressources pour aller plus loin en Lorraine :